07 - Pourquoi les moustiques ?


Mardi 18 juin

La semaine que nous venons de passer à la maison ne fut pas de tout repos. Voire ne fut pas du repos du tout. Mais nous avons eu du bon temps entre les amis du trial, les amis tout court, les petits enfants et la famille.

C'est peut-être d'ailleurs ce qui explique pourquoi nous pouvons partir, revenir, repartir, basculer d'un monde à l'autre sans états d'âme ni boule au ventre : finalement, on ne fait que passer d'un moment de bonheur à un autre moment de bonheur, puis encore un autre, et u autre... 

Cet après-midi nous repartons en train pour Strasbourg puis Rosheim, où nous retrouverons Nancy et Charly. Nous avons quelques heures pour méditer sur l'actualité politique que nous impose notre président capricieux et déboussolé

Tiens, au fait : un aller-retour en train sans aucun retard... C'est assez rare pour être signalé. J'espère que ce n'est pas juste un coup de chance. Bravo la SNCF !

Petite soirée tranquille à Rosheim avec Nancy et Charly tandis que la pluie crépite sur le toit de la véranda. La conversation reprend là où nous l'avons laissée la semaine dernière. Nous avons encore beaucoup de choses à nous dire (et l'actualité politique n'y est pas pour rien).

Mercredi 19 juin

Petite surprise ce matin : Charly a proposé à Isabelle, correspondante locale des "DNA" (Dernières Nouvelles d'Alsace) de venir nous interviewer. Ce n'est pas qu'on recherche la notoriété, et on ne va surtout pas prendre le melon pour si peu, mais c'est quand même bien agréable de se raconter, surtout quand Nancy tente de placer la discussion sur un plan plus philosophique : çà nous oblige à clarifier nos idées...

La pluie nous sert de prétexte pour prolonger encore un peu le plaisir d'être ensemble. Mais il faut tout de même se résoudre à partir.

Nous allons chez Viviane la voisine retrouver Séraphine et Rouletabille, prêts à repartir. Pas de pneus à plat, pas de chaînes rouillées... Apparemment ils ne nous en veulent pas de les avoir laissé tomber pendant 10 jours.

Embrassades, photos souvenir... Il faut y aller. Un fil d'amitié est renoué et c'est l'essentiel. Nous nous promettons de reprendre la conversation, bientôt ou plus tard, en Sarthe, en Alsace ou ailleurs !

Quelques derniers saluts avant de tourner au coin de la rue, et nous rentrons dans notre bulle transparente et sélective (j'y reviendrai).

Nous appuyons modérément sur les pédales - les excès de table de la semaine dernière ne sont pas loin. Donc pas de grandes ambitions pour aujourd'hui : seulement rejoindre et dépasser Strasbourg. Ce qui ne devrait pas poser de difficultés, car la véloroute est plate et le vent tourbillonnant change de sens sans nous laisser le temps de râler.

L'itinéraire entre Rosheim et Strasbourg est un bonheur : c'est la jolie véloroute ombragée du canal de la Bruche, qui nous porte en toute discrétion jusqu'au centre ville, traversant presque sans les voir les immanquables banlieues industrielles et commerciales

Strasbourg mérite sa réputation de ville du vélo. Les belles et lisses pistes cyclables longent les grands axes. La traversée de la ville est fluide... Une ville vraiment cyclable en France, c'est donc possible, quand on veut !

Jeudi 20 juin

Nous suivons le Rhin coté Français jusqu'aux derniers hectomètres, c'est à dire jusqu'à ce que la frontière fasse un brutal angle aigu et file vers le Luxembourg et les Ardennes. Sur la véloroute (toujours l'EV15), pas de frontière visible. On s'aperçoit du changement de pays au changement de couleur du bitume et - un peu plus loin - à la langue des panneaux de signalisation.

Autre changement visible dès la première ville traversée : le système vélo allemand ! 

Bien sûr, comme en France, c'est encore la bagnole qui a la meilleure part. On est quand même au pays de Porsche, BMW et les autres ! Mais ici au moins les cyclistes existent. Ils ont toujours leur place dans le trafic et bénéficient toujours de la tolérance des conducteurs, même si parfois on entend les moteurs rugir...

Tiens, d'ailleurs, en parlant de moteurs qui rugissent, il y a autre chose qui saute aux yeux  : les voitures surbaissées, avec pneus taille basse, jantes alliage noires (ou roses, ou vertes, ou mauves... Beurk !), échappements chromés et surtout sonorisés, et bien sûr caissons de basses à faire pleurer les oreilles et trembler les murs : ici on aime les gros joujoux pour adolescents attardés !

Vendredi 21 juin

Nous poursuivons la "descente" du Rhin coté rive gauche. Le fleuve, déjà large, est bordé de puissantes digues très en retrait des berges, qui laissent imaginer l'ampleur possible des inondations. La véloroute serpente tantôt sur la digue, tantôt en contrebas. Parfois elle s'approche tellement du fleuve que le remou d'une seule péniche (5000 tonnes quand même) pourrait la submerger. Quand on voit un panneau "Hochwasser - Umleitung" (route inondée - déviation), mieux vaut obtempérer.

La journée s'avance, le temps s'obscurcit et nous ne trouvons sur notre route que des "Dauercampings" : villages de mobil-homes moisis, enracinés et entourés de clôtures, qui n'acceptent pas les voyageurs de passage, encore moins les Französisch à vélo couché. On décide de pousser jusqu'à Worms, la prochaine agglomération importante, où il y a sûrement quelques hôtels. 

L'orage et un fort coup de vent nous surprennent en arrivant dans la ville. On déambule un peu dans les rues dans l'espoir de dénicher ce que nous cherchons : un petit établissement bien tenu avec une douche, un bon lit et un copieux Frühstück, mais sans succès. L'heure avance et nous sommes trempés. Alors va pour une réservation express sur Booking... Un seul hôtel est dans nos prix, mais il est très mal noté sur le site. Comme il n'est plus temps de tergiverser, nous décidons de faire fi des commentaires négatifs et réservons la (soi-disant) dernière chambre disponible... En fait, c'est plutôt une bonne surprise. L'hôtel est presque vide. Le patron nous a tout de suite proposé un endroit pour garer nos vélos, et la chambre était correcte. Bonne douche, bon dodo au calme, c'est l'essentiel. Pas de Frühstück mais c'est pas grave : la première boulangerie ouverte fera l'affaire.

Samedi 22 juin

Puisque nous avons traversé le Rhin en arrivant à Worms, nous décidons de continuer en restant sur la rive gauche. Dès le matin nous retrouvons l'habituelle petite pluie fine et intermittente. Bof, ça ne nous fait plus rien. Pédalons puisqu'il n'y a que ça à faire...

Au fait, dans le chapitre précédent je vous racontais que les jours sans pluie depuis notre départ le 12 mai se comptaient sur 2 doigts d'une seule main... Et bien aujourd'hui 22 juin le compteur est toujours bloqué à 2 ! C'est pas comme si on était le premier jour de l'été. Mais je persifle, je persifle...

La voie de la rive gauche est plus directe, et nous arrivons plus tôt que prévu à Mayence, au confluent du Rhin et de la Main. Mayence est la ville de Gutemberg, alors une visite du musée qui lui est consacré s'impose. Hélas, toute les explications sont en allemand, ce qui gâche un peu. Dans la ville qui a vu naître l'imprimerie c'est un comble ! On a tout de même pu admirer les premières bibles imprimées par Gutemberg, conservées dans une énorme chambre forte.

Nous ne nous attardons pas dans la ville. Trop de monde. Je commence à croire qu'on a un problème avec les villes... Et en plus ce soir dans toute l'Europe et au delà, c'est la fête de la musique. On s'attend à quelques difficultés pour trouver le sommeil. 

Et pour couronner le tout, Mayence est dans l'axe des pistes de l'aéroport de Francfort. Au moins le bruit des avions couvrira celui des sonos à fond. 

Nous choisissons un camping un peu à l'écart de la ville, installé sur une ile du Rhin (qu'il occupe en totalité). 1000 emplacements permanents, un petit carré d'herbe pour les campeurs de passage... Et 3 douches. 20 euros en espèces, qui ne passeront sûrement pas dans le tiroir-caisse, ni dans la comptabilité... Peut-être même pas dans la poche du patron...

Mais finalement, avions et flons-flons ne sont que de petits désagréments par rapport aux nuées de mamans-moustiques qui sont des milliers à chercher du sang frais, guidées par la chaleur humaine et affolées par nos appétissants effluves de sueur...

Ben oui, évidemment : humidité entretenue par les pluies incessantes + chaleur moite + proximité du fleuve + berges marécageuses = moustiques !

Même après la douche, rien n'y fait. Fin de la soirée sous la tente. Et même sous la tente le combat continue ! Demain ça va gratter.

Alors question : pourquoi les moustiques ? Pourquoi l'évolution a-t-elle autorisé pareille bestiole ? Si encore ils volaient en silence, mais non ! Faut qu'ça bzzzz jusque dans les oreilles ! Et pourquoi ça démange ? moi je veux bien leur céder un peu de globules, mais eux, qu'est-ce qu'ils me donnent en échange ? des boutons qui grattent, voire de la fièvre. Merci !

S'il vous plaît M. Darwin (ou Dieu si vous voulez), fais-nous des moustiques silencieux et indolores !

Je m'impose un petit passage par Wikipedia pour calmer mes envies de génocide : les moustiques sont nos amis, il faut les aimer aussi. Ils font partie de la chaine alimentaire, ils ont donc aussi leurs prédateurs. Hirondelles et grenouilles, allez-y, mangez tout !

Dimanche 23 Juin

Nous quittons les moustiques, Mayence et la vallée du Rhin pour la rivière Main, avec une grosse ville à passer : Francfort

Dans le ciel (enfin bleu...), c'est l'heure de pointe. Les avions en approche des pistes parallèles se suivent à moins d'une minute d'intervalle. Dire que çà doit être comme ça dans la plupart des villes importantes. Nous vivons dans un monde de démesure...

Au sol, au moins, la route est belle, plate et encore assez peu fréquentée ce matin. Béatrice inaugure un nouveau mode d'assistance zéro carbone : on se donne la main. Est-ce le nom de la rivière qui nous a soufflé cette idée ? Je tire un peu, je perds 2 km/heure et Béatrice en gagne 4. Bonne affaire...

Après quelques contournements de zones industrielles, la véloroute rejoint la rivière et la traversée de Francfort est plutôt agréable. Mais c'est dimanche et il faut slalomer entre les nombreux promeneurs... Nous discutons avec un couple de cyclistes locaux qui trouvent que leur ville n'est pas si grande puisqu'une journée suffit pour la traverser à vélo. Nous nous contentons d'approuver poliment...

Le camping de ce soir (Hanau) est tout l'inverse de celui d'hier : organisation à l'allemande et propreté irréprochable. Et cette fois nous déclinons nos identités, présentons nos passeports et tout et tout. Clou du spectacle : "pour payer, c'est à 18 heures si vous payez en espèces et à 19 heures si vous payez par carte". Ne cherchons pas à comprendre... Je reviens avec mon petit billet de 20 euros à 18 heures pétantes, et je repars avec une belle facture imprimée, avec le logo en couleur...



Départ de Rosheim - Véloroute des carrières

Canal de la Bruche

Camping à Gambsheim

Véloroute au bord du Rhin : Hochwasser !


Petit bac inattendu

Arrivée à Worms

Coupe d'Europe de football

Francfort

Les aquarelles de Béatrice








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